Harlan COBEN sauvé des flammes *
Il arrive l’air contrit à la bibliothèque, un livre à la main :
- Je rapporte un livre abimé nous dit cet habitué de la bibliothèque, gêné.
Effectivement, le livre est en piteux état, la tranche éclatée, les pages noircies, la couverture détrempée.
Soudain, l’éclair jaillit dans la tête de l’une des bénévoles :
- Ah c’est vous l’incendie dans la maison ?
Et voilà toutes les personnes présentes ce jour à la bibliothèque entourant notre jeune lecteur assidu, qui devant tant d’attention se met à expliquer le pourquoi, le comment, les suites à gérer de l’incendie qui dévasta sa maison. Et le peu qu’il a pu sauver, entre autre, ce livre de Harlan COBEN.
Il ne s’en rend peut-être pas compte, mais il y a quelque chose de touchant dans le sauvetage de ce livre et dans ce souci qu’il a eu de nous le rapporter.
Parmi toutes ces choses que notre lecteur cherche à récupérer, papiers, linges, habits, petits meubles et autres objets remplis de souvenirs, on imagine ce livre au milieu de tout ce nouveau désordre causé par les lance-flammes des pompiers soudain retiré précautionneusement par une main délicate pour le rendre à son propriétaire. Ce geste nous dévoile en même temps que ce livre avait sans doute une place tout aussi importante que les autres petites choses qui peuplaient cette maison.
Ainsi, un livre une fois entré dans une maison fait partie des meubles, témoin silencieux de la vie de ses habitants. Et quand ceux-ci vivent des joies mais aussi des drames, il s’en trouve mêlé malgré lui. En quittant les rayonnages douillets de la bibliothèque, un livre court-il des risques ?
- Vous avez eu le temps de le lire quand même ?
- Non, que la moitié répond-il, esquissant un petit sourire.
Pour manifester notre soutien et pour ne pas en rajouter à toutes ces tracasseries auxquelles notre lecteur doit faire face pour récupérer ses biens, on prend le livre qui porte les traces du traumatisme :
- Ne vous inquiétez pas, c’est peu de chose par rapport à tout le reste !
Alors qu’il est question du chien de la maison qui lui aussi a perdu ses repères depuis l’incendie, ce livre qui aura partagé avec son lecteur un évènement douloureux, est mis subrepticement au rebut, comme d’autres l’ont été avant lui.
N’est-ce pas le destin d’un livre de bibliothèque qui, passant de mains en mains, de maison en maison, vient à vivre moultes péripéties ?
* ce texte est publié avec l'accord du lecteur en question.